Nés en 68 : homosexuels séropositifs ou bourgeois réactionnaires

Publié le par Thomas Grascoeur

        Le titre annonçait une fresque sentimentale en politique sur la tourmente des événements ; mais si l'on voit la tourmente, on peine à distinguer les événements, qui se réduisent aux élections des présidents de la République, surtout là pour servir de buttes témoins chronologiques à cette épopée un peu brouillonne et simpliste. On mélange allègrement militantisme et nostalgie. "Il faut poursuivre la lutte", dit-on autour d'un repas chinois mondain. La lutte, peut-être, mais laquelle ? La cause de l'amour libre et des ménages à trois-quatre ? La cause homosexuelle ? La cause de l'avortement ? La cause des enfants non désirés ? La cause "des sans-papiers" ? La cause du cancer ?
        Si le film commence par un éloge du communautarisme hippie, il est peu à peu pris au piège de son propre égoïsme. Finalement, chacun n'aime les autres que pour lui-même, et la lutte, c'est la bonne conscience. Il y a des victimes, et on s'insurge contre les causes sans les nommer. C'est "le capitalisme", "les lobbies", la "société", qui viennent finalement remplacer, avec leur main invisible, le destin et les dieux de la tragédie grecque. C'est la limite d'une fiction sentimentale par rapport à un documentaire engagé.
        A la question "qu'a apporté mai 68 ?", un personnage répond : "maintenant, on baise avec qui on veut et on a le droit de ne pas être d'accord". De ne pas être d'accord, peut-être, mais avec qui ?
        La révolution fond face au personnage de Laetitia CASTA, qui se lamente que la vie soit si compliquée et si injuste. Pourquoi est-ce qu'on meurt, alors qu'on pourrait être si heureux à fumer et faire l'amour ? Mais ça, ce n'est déjà plus de la politique...
        Nés en 68, appel à la lutte universelle ? Ironie du sort, ce film restera plutôt une tentative avortée.

Publié dans France

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