"Le grand alibi" n'en a pas besoin

Publié le par Thomas Grascoeur

         Pour une fois, cette adaptation française d'un roman d'Agatha CHRISTIE ne souffre ni du dépaysement ni du changement d'époque. Le secret tient peut-être en ce que Pascal BONITZER ne réalise pas un polar, mais un drame psychologique. D'ailleurs, le personnage d'Hercule POIROT est remplacé par un commissaire insignifiant. Pascal BONITZER ne filme pas des crimes, mais des passions. Et flirte élégamment avec les règles du genre.
        Le casting est éblouissant, mais ce ne sont pas les plus grandes vedettes qui ont les rôles les plus denses. Pierre ARDITI fait dorénavant partie des meubles dans cette galerie des incontournables du cinéma (et boulevard) français ; il devient peu à peu le nouveau GABIN vieillissant, dont le jeu efficace se limitera bientôt à une mastication impatiente et désabusée. En revanche, Matthieu DEMY ou MIOU-MIOU, pour ne citer qu'eux, apportent au film une sincérité surprenante.
        Autre caractéristique du genre, la musique, démodée, dissonante, mais jamais hors de propos. Atypiques également, le découpage très net, elliptique, confié à Monica COLEMAN, collaboratrice de François OZON, et la photographie très froide qui ne tombent jamais dans la facilité. 
        Le dénouement arrive, les masques tombent, mais seule une question reste sans réponse : pourquoi avoir adapté ce roman d'Agatha CHRISITE, qui, selon l'aveu du réalisateur lui-même, "n'est sans doute pas le mieux construit" ? C'est un film de commande, mais la personnalité du réalisateur éclate au travers. Comme si, pour réaliser cette réflexion sur la mémoire, la passion et la vérité, au sommet de son talent, il lui avait fallu l'alibi d'un polar.

Publié dans France

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